Programme seconde option théâtre
Le théâtre, art vivant et collectif
Art vivant et contemporain, tout autant que porteur d’une longue histoire, le théâtre est une pratique artistique collective qui s’inscrit dans un lieu concret et un moment présent, et qui implique une relation toujours nouvelle avec un public.
Fidèle à cette spécificité, l’enseignement du théâtre au lycée donne au jeu et aux diverses activités théâtrales qui l’accompagnent (scénographie, mise en scène, décors et costumes) une place centrale et première. Également fondé sur le développement d’une pratique régulière de spectateur, il vise à susciter chez les élèves, sous la conduite du professeur, un dialogue aussi riche que possible entre ce qu’ils retirent de leur mise en jeu et les spectacles vus par la classe. Cet enseignement postule en effet que c’est à partir de l’expérience sensible et des formes diverses de son partage que l’élève acquiert progressivement une culture théâtrale à la fois pratique et théorique, artistique et historique.
C’est donc d’abord par la pratique (d’acteur ou de spectateur), puis par son approfondissement réflexif et par les savoirs introduits à cette occasion, que l’élève découvre progressivement les nombreux enjeux qui l’invitent à développer une pensée du théâtre. Celle-ci se nourrit également de la lecture de grands textes de praticiens de cet art.
Enfin, comme ceux-ci l’ont constamment rappelé, le théâtre est toujours une aventure humaine, individuelle et collective. Fondée sur l’engagement personnel de l’élève dans le jeu, la pratique théâtrale développe indissociablement la formation d’un « esprit de troupe », où s’associent solidarité, générosité, et liberté.
Cet enseignement repose sur quelques grands principes :
- Le théâtre est considéré à la fois comme art ou esthétique, et comme un fait social et culturel au sens le plus large. Ainsi l’école du spectateur prend-elle en compte « le fait théâtral » dans tous ses aspects : esthétiques et dramaturgiques, mais aussi sociaux, historiques, anthropologiques, politiques, économiques.
- Un soin particulier est porté à ce que les élèves découvrent, par la pratique comme par les spectacles qu’ils ont vus et auxquels ils ont assisté, une large diversité de formes théâtrales ouvrant à des problématiques variées.
- C’est grâce à l’expérience sensible et subjective de chacun, et en s’appuyant sur elle, que se développe en classe l’analyse de la représentation.
- L’intérêt porté au processus de création conduit à faire de la pratique du jeu un lieu de recherche qui sait accueillir les tentatives et les « ratages », les fragilités et les maladresses des élèves, et en reconnaître les bénéfices.
- La dimension collective de cette pratique, comme celle de l’activité de spectateur et de la réflexion qui en découle, peut en tant que telles, donner lieu à analyse et discussion.
- Une ou plusieurs présentations de travaux, pour leurs dimensions fédératrices et pour la réflexion qu’elles génèrent, sont mises en place sous forme de répétitions ouvertes, de chantiers, de point d’étape du travail, de présentation de fin d’année, selon les processus de travail adoptés en amont.
- L’alliance du plaisir et de la rigueur est constamment recherchée.
Mise en œuvre : le partenariat
La mise en œuvre de cet enseignement est assurée par une équipe composée d'un professeur aux compétences reconnues en théâtre et d’un artiste professionnel soucieux de la transmission de son art, en liaison avec des institutions culturelles : théâtres nationaux, centres dramatiques nationaux, scènes nationales, scènes conventionnées, théâtres municipaux, compagnies, conservatoires, associations habilitées. Lorsque cela est possible, cette équipe associe plusieurs professeurs de diverses disciplines et plusieurs artistes.
Progression
Même s’ils s’ordonnent de manière progressive, les présents programmes doivent être abordés dans une logique constante de réitération et d’approfondissement. L’ordre des contenus ne doit pas empêcher que des définitions et des distinctions minimales soient régulièrement reprises. À l’occasion d’un spectacle, d’une rencontre ou d’une activité pratique, et selon les besoins, des notions essentielles telles que la mise en scène, la scénographie, la représentation, la performance, sont utilement ré-envisagées, et réinvesties dans la pratique.
Enjeux et objectifs
Au collège, l’élève a abordé le théâtre à partir de la littérature dramatique. L’enseignement optionnel vise une approche à la fois plus globale et plus artistique du théâtre à partir de la scène et de la pratique du jeu de l’élève. Ainsi, il développe conjointement la sensibilité et la réflexion, l’imagination et le savoir.
Ses trois composantes, toujours liées, sont la pratique collective et individuelle du jeu, l’expérience de spectateur, et l’acquisition d’une culture théâtrale. De la seconde à la terminale, l’enseignement est progressif. Son objectif principal est de construire l’autonomie des élèves dans leur pratique et leur réflexion sur l’art dramatique.
Au centre de l’apprentissage en seconde, l’approche sensible conduit l’élève à explorer et à penser l’art de se mettre en jeu. Le double regard de l’artiste et du professeur permet des approches complémentaires nécessaires à la formation de l’élève. En outre, il appartient au professeur de mettre en relation cette pratique avec l’expérience de spectateur, et de s’appuyer sur l’une et l’autre pour introduire progressivement des savoirs : c’est à l’occasion de la mise en jeu de l’élève au plateau ou en relation avec une représentation vue par la classe que sont abordées les questions liées à l’histoire et aux théories du théâtre.
Au-delà de la seconde, tout élève peut suivre un enseignement de théâtre, sans prérequis défini. Deux parcours sont proposés dont le cumul est possible : l’enseignement facultatif et l’enseignement de spécialité.
· Pratique théâtrale : se mettre en jeu
En classe de seconde, la pratique théâtrale se situe au cœur de l’enseignement. L'élève est d’emblée confronté à une question fondamentale : avec quoi l’acteur joue-t-il ? Il explore ainsi par l’imaginaire sa relation au corps, à l’espace, aux partenaires de jeu, au public, aux dramaturgies, au langage… Jouer avec ces composantes, c’est aussi aborder la scène en expérimentant la diversité des conventions théâtrales et des codes de représentation.
Sans que le travail se réduise à une suite d’exercices techniques, l’élève découvre progressivement quelques-unes des ressources dont dispose le comédien pour mettre en place une situation et proposer un acte théâtral. Il apprend à faire des propositions de jeu réfléchies, pour lui, pour les autres et avec les autres.
C’est par la découverte de soi, par l’imagination par le fait d’être sur un plateau dans un espace pensé, par l’élaboration collective d’un acte théâtral que l’élève se met en jeu. Ainsi, le projet proposé par le professeur et l’artiste partenaire lui permet de prendre conscience de la présence de son corps sur le plateau et de l'énergie qu'il doitmobiliser. Il apprend à utiliser ses possibilités physiques pour proposer une situation, un état, ou dessiner une figure, un personnage. Cette présence du corps s’appuie également sur le regard qui permet de créer un espace, d'établir une relation avec les partenaires et avec le public ou de suggérer des intentions de jeu. Progressivement, l'élève apprend alors à̀ placer sa voix de façon à être audible - et intelligible - pour le public ; il prend conscience de sa respiration, utilise son souffle, travaille sur le rythme, le registre, la hauteur, la durée, le timbre de la voix. Il maîtrise progressivement ses adresses, tant à ses divers partenaires qu’au public, en fonction de codes ou d’intentions de jeu. Dans cet acte théâtral qu’il met en place et auquel il participe, l’élève fait appel à son imaginaire et à sa réflexion pour enrichir ses propositions de jeu. La confrontation de l'intuition de l'élève avec la réaction du professeur, de l'artiste, et de la classe contribue à l'élaboration d’une approche personnelle du jeu théâtral.
L'élève aborde le texte écrit, dramatique ou non, par des approches diverses : lecture à voix haute, improvisation, mise en espace, mise en scène. Il travaille la diction en abordant le texte comme une partition ; il découvre ainsi diverses interprétations. Il peut également improviser à partir de canevas, de thèmes, de situations, de consignes oude rythmes. Il peut enfin proposer un travail d’adaptation ou une écriture de plateau, dans le cadre d’un projet individuel ou collectif. Il construit alors un événement théâtral, aussi modeste soit-il, le développe et le conduit à son terme.
L’équipe formée du professeur spécialiste en théâtre et de l’artiste partenaire impliqué dans des processus de création a toute liberté de mener un, deux ou trois projets durant l’année, comme des laboratoires permettant d’explorer différentes modalités de jeu. La dimension collective du travail et l’apprentissage par la recherche libre et hasardeuse, productive dans le domaine artistique ou dans un cadre didactique, sont privilégiées. La restitution desprojets menés en classe devant un public choisi est une étape importante, festive, et pédagogiquement riche d’apprentissages pour l’élève, car alliant rigueur et plaisir, sens du collectif et risque individuel : elle peut prendre la forme d’une répétition ouverte, d’un chantier, d’une présentation de fragments, etc.
Parcours du spectateur :
partager le sensible, penser le fait théâtral
La pratique de spectateur (de théâtre et d’autres arts vivants) est une composante essentielle de cet enseignement, tout au long du cursus ; un nombre minimum de six représentations au cours de l’année est recommandé en seconde. Outre l’éclairage qu’ils apportent sur le travail de plateau mené en classe, les spectacles vus ou auxquelsles élèves assistent sont la base sur laquelle s’élargit peu à peu leur culture théâtrale.
Dès la classe de seconde, la réflexion collective sur ces spectacles, guidée par le professeur, entraîne les élèves à approfondir leur expérience sensible, à la verbaliser, à réfléchir aux émotions éprouvées, à les mettre en partage, à prendre conscience de leurs critères de jugement, à enrichir leur interprétation et leur compréhension de celles des autres.
Analyser un spectacle, c’est à la fois faire un exercice collectif de mémoire et apprendre à repérer, à décrire concrètement, à comprendre le fonctionnement des éléments qui le constituent : jeu, scénographie, lumière, musique, objets… C’est interroger la cohérence dramaturgique et esthétique qui les lie, réfléchir à la place variable du texte, au rôle de l’auteur, de l’acteur, du metteur en scène dans le processus de création.
Mais la pratique de spectateur n’est pas qu’une expérience artistique individuelle : le théâtre est aussi, depuis toujours, une expérience sociale au sens le plus large, dont il est important que l’élève prenne conscience.
Quel qu’il soit, le lieu théâtral essentiel, à l’expérience de l’acteur et du spectateur, est le premier élément, concret pour introduire à cette approche : la place du théâtre dans la ville, l’architecture extérieure et intérieure du bâtiment, le rapport entre la scène et la salle, sont autant de points de départ pour une réflexion historique, sociologique, voire anthropologique sur le théâtre.
En assistant dans l’année à plusieurs spectacles si possible très différents, l’élève éprouve la variabilité de la relation théâtrale, et la nature performative de toute représentation, qui constitue chaque expérience comme un événement unique dans un contexte précis.
En faisant l’expérience du spectacle vivant, et en approfondissant cette expérience par la réflexion, l’élève entre dans le dialogue que le théâtre entretient avec les thèmes de notre temps ; il se rend attentif à la façon dont le théâtre résonne avec le monde.
Le visionnage d’extraits de captation ne remplace aucunement l’expérience vécue du spectacle, et les élèves d’une option théâtre doivent être les premiers à le comprendre. Mais contextualisée par le professeur, cette ressource peut apporter de riches compléments à l’enseignement. Elle est également une très bonne entrée pour initier les élèves àla question de l’archive et de son utilisation.
La culture théâtrale
Grâce à un parcours cohérent permettant de faire dialoguer les différents axes de l’enseignement, le professeur apporte progressivement des savoirs sur le théâtre. Terrain privilégié pour former à l’appréciation esthétique, l’analyse d’une représentation donne aussi l’occasion, ainsi que l’expérience du plateau, d’introduire des éléments de dramaturgie, d’histoire du théâtre (notamment grâce au répertoire), d’histoire de la mise en scène, du jeu etc. Les élèves sont amenés à découvrir les textes théoriques de praticiens du théâtre, à y recourir pour penser leur pratique de spectateur et de jeu.
Acquérir une culture théâtrale, c’est en effet prendre conscience de la diversité des formes qu’a prises et que prend le théâtre. Pour cette raison, il est souhaitable de varier les approches : certains spectacles vus se prêtent à une approche dramaturgique (rapport au sens, à la lecture du texte), voire sémiologique (signes de la représentation) ; d’autres, fonctionnant sur un mode plus performatif, appellent des analyses de la perception. Grâce à cette diversité, l’élève constate concrètement que le rapport à la fiction, à l’illusion, au présent théâtral, à la signification, est variablecomme l’est la place du spectateur. À partir de l’expérience vécue de la représentation, il est donc progressivement amené à comprendre que les enjeux du théâtre varient non seulement esthétiquement, mais selon les sociétés, les cultures, les époques, et que toute représentation participe d’une histoire culturelle, sociale, anthropologique.
La visite d’un théâtre au moins et les rencontres avec les équipes artistiques et administratives sont vivement recommandées : le savoir sur le théâtre passe aussi par les échanges avec ceux qui le font, par la découverte concrète d’un lieu avec les techniciens, par la connaissance des réalités institutionnelles, de l’histoire du théâtre public et des politiques de la culture en France.
Compétences
Au sortir de la classe de seconde, l’élève aura acquis des compétences liées à la pratique théâtrale ainsi que d'ordre culturel et méthodologique. En réalité imbriquées, ces compétences sont distribuées ci-dessous en catégories distinctes par souci de lisibilité et d’efficacité. Les axes proposés ne se veulent pas un « référentiel de compétences », ils visent plutôt à explorer les différents aspects de l’évaluation, à permettre à l’élève de se positionner et au professeur de prendre conscience du chemin parcouru ainsi que des objectifs à atteindre.
Compétences pratiques
L’élève est capable :
- de se mettre en jeu et en relation avec ses partenaires, tout en ayant conscience du public ;
- de faire des propositions de jeu variées seul et dans une réalisation collective ;
- de jouer avec un certain nombre de conventions théâtrales impliquant le corps et la voix de l’acteur ;
- de penser un espace de jeu pertinent ;
- d’improviser à partir d’une situation simple ;
- de réagir à de nouvelles consignes de travail ;
- de mettre en relation son travail de plateau et ses connaissances théâtrales ou son expérience de spectateur.
Compétences culturelles
L’élève est capable :
- de revenir sur son expérience sensible de spectateur pour l’analyser et la partager ;
- de distinguer les principales composantes d’une représentation ;
- de dégager, dans les spectacles vus, des enjeux et des partis pris dramaturgiques ou esthétiques ;
- de repérer quelques grandes périodes de l’histoire du théâtre ;
- d’élargir ses connaissances de la création contemporaine et des métiers du théâtre.
Compétences méthodologiques
L’élève est capable :
- de verbaliser ses émotions, d’exprimer un jugement personnel argumenté, et d’entrer dans une réflexion collective ;
- de proposer une analyse orale ou écrite du travail de plateau et des spectacles vus ;
- de mener une recherche documentaire au CDI ou sur Internet.
Evaluation
Au fil de l’année, l'équipe partenariale mesure régulièrement :
- l’engagement de l'élève dans le travail ;
- sa créativité ;
- sa progression dans la maîtrise des techniques et de la méthodologie ;
- ses acquis culturels ;
- sa capacité à concevoir, construire et analyser, en relation avec un travail collectif, des propositions théâtrales.
La plus grande part de cette évaluation porte sur la pratique régulière de l’élève, sur ses progrès au plateau, sur son engagement personnel comme sur son rapport au travail collectif. Pour mesurer les progrès de l’élève, l’équipe partenariale tient compte du résultat en fin de projet, mais, tout autant, du parcours accompli : la recherche sur le plateau ou par la réflexion, les prises de risques, la contribution au projet commun sont fortement prises en compte.
L’évaluation concerne également les progrès de l’élève dans sa pratique de spectateur et dans sa culture théâtrale. Orale ou écrite, elle peut prendre diverses formes, au choix du professeur : exposé de l’élève sur un point ou une notion, compte rendu d’une lecture en lien avec le programme, lecture expliquée d’un court extrait de texte théorique en lien avec le travail de plateau ou un spectacle vu, compte rendu ou analyse de spectacle, bilan d’une séance de travail, mais aussi proposition concrète d’une composante d’un projet (maquette d’un espace, croquis de costume, adaptation d’une scène, etc.).
Le carnet de bord, dans lequel l’élève consigne et analyse la mise en œuvre du projet, des indications de jeu, des synthèses sur le travail en cours, des remarques personnelles, peut devenir un outil privilégié de l’évaluation. L’élève peut aussi y garder des traces de sa réception des spectacles vus et de leur analyse en classe, y reporter certains éléments des recherches qu’il a effectuées. La part imaginative ou visuelle (photos, croquis, etc.) peut y être présente. Sa forme est choisie par l’élève (papier, numérique), en accord avec le professeur.
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